Cyrile

Apparence

Ses cheveux sont châtains clairs et rarement peignés, quelque soit la longueur –elle a le chic pour les couper sans prévenir, si possible en dépit de toute considération esthétique–. Son regard gris acier est souvent moqueur ou espiègle, il sait également être dur et cassant parfois. Sa silhouette fine et souple lui assure un passage aisé à peu près partout « sans déranger » et permet une certaine discrétion au besoin. Sa musculature ferme et bien dessinée trahit son style de vie relativement aventureux, ou en tout cas très mouvementé. Ses manières sont très peu féminines.

Elle cultive avec soin une sorte de « masculinité » qu’elle revendique. Elle revêt souvent une tenue de voyage un peu usée, principalement composée de pièces de cuir, et pas toujours impeccable, comme si elle était toujours en partance, ou venant d’arriver. Elle ne porte absolument aucun soin à son apparence, ou alors un soin extrême à faire croire qu’elle se néglige, sait-on jamais. Ses réflexes sont naturellement aiguisés et ses gestes vifs, parfois trop.

Traits de Caractère

Vive d’esprit et de propos, elle est souvent gaie et d’excellente compagnie. Elle est d’un naturel confiant. On la sait particulièrement fidèle, et généreuse. Elle est souvent taquine, parfois caustique. Elle se sent étouffée par l’histoire familiale et les obligations qui en découlent, aussi cherche-t-elle à les éviter le plus souvent possible. On la dit plus à l’aise avec les gens du commun qu’en société.

Son esprit est épris de liberté avant tout, elle rechigne à se plier aux contraintes quelles qu’elles soient. Elle a un goût prononcé pour l’irrévérence. Elle se montre souvent provocatrice et rebelle à l’ordre établi, n’hésitant pas à chahuter les croyances et les us de ceux qui l’entourent.

Elle se montre têtue, parfois colérique mais jamais rancunière. Il n’y a guère que sa sœur Sonatine qui puisse venir à bout de son impatiente ou de sa révolte.

Elle est peu intéressée par les contingences matérielles, elle sait vivre avec peu, simplement, et s’en contenter. Toutefois elle prend très au sérieux le fait de gagner elle-même de quoi vivre, pour elle et pour sa famille.

Aptitudes et Talents

Elle passe pour une jeune femme particulièrement cultivée, en société tout du moins. Elle est aussi une grande joueuse d’échec même s’il lui arrive de perdre de temps en temps.

Pitre de la famille, elle réussit encore bien imiter les voix et les accents. Il arrive qu’elle utilise ce talent dans d’autres circonstances hors du cadre familiale.

On lui sait également un don avec les animaux. Elle aime notamment prendre soin de ses chiens, deux molosses qui n’obéissent à personne d’autre.
C’est une jeune femme pleine de ressource, elle aime chasser et pêcher, elle ne revient jamais bredouille (par contre, ne lui demandez pas de préparer le repas si votre palais est délicat). Il semblerait qu’elle se débrouille aussi bien avec les plantes, quel qu’en soit l’usage final.

Tradition familiale oblige, elle supporte l’alcool de façon peu commune. Elle a aussi longuement étudier avec le maitre d’arme de la famille, sans chercher particulièrement à exceller dans ce domaine toutefois.

Relations avec la maisonnée

En règle général, on peut dire que Cyrile aime son frère et ses soeurs, mais hélas elle ne sait pas comment leur montrer.

Diminuendo : Sa sœur ainée est une sorte de modèle pour elle, quand bien même elle ne voudra jamais l’admettre. A ses yeux Dimi est une femme qui a gagné son indépendance et qui montre une certaine force de caractère et de conviction : ce qu’elle voudrait être elle-même.

Silwenne : cette âme sensible et secrète est un profond mystère pour Cyrile. Elle l’envie de façon inconsciente car à ses yeux Sil est ce qu’elle-même ne sera jamais : une femme magnifique et qui n’a peur de rien. Sil a tout, la beauté la grâce, l’intelligence, et un sens artistique véritable. Cyrile souffre parfois de la comparaison et préfère encore se couvrir de boue que d’avoir à y penser davantage.

Sonatine : Cyrile et elle sont particulièrement proches puisqu’elles ont partagé la même chambre pendant des années. Alors qu’à peu près tout devrait les séparer, c’est avec Sonatine que Cyrile a le plus partagé, échangé. C’est aussi Sonatine qui parvient le plus facilement à lui faire changer d’avis. Cyrile prend soin de sa sœur, elle a prouvé à maintes reprises combien elle lui était attachée.

Aristide : Son petit frère a longtemps été son souffre douleur. Depuis qu’elle a cessé de l’embêter, elle se sent liée à lui de façon particulière, probablement parce qu’ils sont tous les deux les plus jeunes, même si elle n’est pas sûre de bien le comprendre.

Lyam Telos : « Monsieur Télos » et Cyrile ne se parlent pas beaucoup. La jeune femme reste étonnamment froide et distante avec le gardien de la famille. Elle se contente d’échanger des politesses du bout des lèvres.

10 ans : un pique-nique

Il fait déjà chaud ! Je marche à coté de Sonatine depuis que nous sommes partis. Je l’entends qui respire un peu fort, mais ses joues sont roses et elle sourit. On dirait que ça va.

Mère la prend par la main et l’encourage, l’air de rien. J’hésite à faire de même et finalement je reste derrière elles deux, au cas où. C’est moi qui ferme la marche pendant un moment. Père est tout devant et Ary trotte sur ses talons. Dimi boude, encore, dirait-on, et Sil… Elle danse plus qu’elle ne marche. De toute façon, elle fait tout bien.

En plus d’un panier de victuailles, assez lourd, qui me scie les doigts par intermittence, j’ai mon violon en bandoulière dans le dos qui me cogne les mollets. Ca tombe assez mal d’ailleurs, hier je me suis bataillée avec un copain, je dois avoir un gros bleu sur l’épaule, ça tire à chaque pas. Mais je n’en laisse rien voir je ne voudrais pas être privée de sortie, encore.

On a prévu d’organiser un tournoi, comme pour des chevaliers, mais entre nous. Les étrangers contre les crétins. Hi hi ! Les Krytiens. Avec Lilian on s’est mis d’accord déjà, il a trouvé un grand bâton pour faire la lance, il a dit. J’ai hâte de voir ça ! Arnaud a dit que je n’avais pas le droit de participer parce que les dames, elles doivent regarder seulement. Mais avec Lilian, on l’a attrapé, il y a trois jours. Je lui ai dit que je voulais être un chevalier et que je participerais quand même. Il m’a cognée dur, et je n’ai pas pleuré. On s’est battu et les autres ont dit que j’avais gagné le droit. Ca valait le coup, même si là, avec le violon ça fait quand même encore très mal.

Bon… en fait, aujourd’hui c’est loin d’être aussi douloureux que l’autre fois avec Lilian quand on est tombés d’un arbre. Lui, il s’est carrément cassé le bras, moi je m’en suis sortie avec un bleu sur la cuisse et le genou. J’ai boité un moment d’ailleurs, mon genou avait pris un drôle de couleur assez moche.

Mais bon maintenant je n’ai plus du tout mal à la jambe. C’est dommage que je n’ai pas eu de cicatrice quand même, ça aurait rudement impressionné mes copains. Lilian aurait été très fier, et moi aussi. Arnaud en a une, lui, de cicatrice, une qui est très longue, en travers du dos, il nous la montre souvent. Il parait qu’il a failli mourir pour de vrai, mais il n’a jamais dit comment s’était arrivé.

Parfois quand je me fais mal, j’arrive à le cacher le temps que le bobo disparaisse. Alors je suis sûre que je ne me ferai pas disputée. Si c’est Sil qui le voit, elle ne dit rien. Dimi elle est carrément déjà intervenue pour m’aider, mais bon je me suis quand même faite disputée ensuite, alors que je n’avais même pas eu mal. Quand c’est Sonatine, c’est une autre affaire… Je l’ai convaincue déjà plusieurs fois mais quand c’est grave elle préfère le dire à Mère. Je ne lui en veux pas du tout, nous prenons soin l’une de l’autre, c’est normal.

Enfin, si seulement je n’avais pas cette satanée robe si ample et si lourde sur moi, je pourrais lever les genoux et marcher dans les hautes herbes sans m’en soucier, et je pourrais rester à hauteur de Mère et Sonatine. Je pourrais lui prendre la main aussi, pour l’aider au besoin.

Nous nous interrompons régulièrement, je cueille les fleurs qu’elle me dit. Elle a un don pour choisir les plus belles, je fais bien attention de les cueillir avec des tiges longues et puis elle les dépose dans son panier. Elle a dit qu’elle voulait décorer la table. Ce sera très beau, j’en suis sûre.

Enfin nous arrivons près du lac, l’air est à peine plus frais, on sent l’influence de l’étendue d’eau. Comme je jette un œil à Sonatine je la vois qui frisonne à peine.  Elle sourit toujours. On dirait que ça va. Je crois qu’elle est soulagée que nous soyons arrivés tout de même. Mère dépose la couverture et je suis ravie de planter là mon panier et mon violon. Nous jouerons un morceau certainement après le repas. Quand je joue avec mes sœurs, ça va. J’ai bien répété, surtout avec Sonatine. Toute seule, je sais bien que je n’arrive à rien. Ce n’est pas comme Sil, qui a des doigts magiques.

Je m’installe après que chacun ait trouvé sa place, Sil me regarde du coin de l’œil, Sonatine me sourit et met une fleur dans mes cheveux. J’attendais cette promenade depuis des lustres, je suis si heureuse que j’ai envie de pleurer. Dimi me regarde bizarrement, je suis sûre que ça se voit, je fronce un peu pour me donner un air sérieux, comme elle.

J’aime cet endroit, ce lac, et le sous-bois qui le borde. Quand je serai grande je vivrai dans un endroit comme celui là, ou alors dans une cabane dans un arbre, ou alors dans un chalet au sommet de la montagne.

Le temps passe un peu trop vite, je suis vraiment contente que nous soyons tous réunis. J’ai bien envie de me glisser dans l’eau et puis de courir partout mais tant pis, je reste près de Sonatine, pour une fois qu’on peut être dehors ensemble. J’aimerais tellement qu’un jour elle puisse venir avec moi. Nous prendrions ce chemin sinueux en face d’où nous sommes assises, nous irions jusqu’au sommet rien que pour le plaisir, en courant, en riant. Et nous rentrerions à la maison sous une pluie de grosses gouttes de pluie éparses, de celles qui sentent la mousse et l’herbe fraichement fauchée.

Un jour on le fera, avec Aristide, même.

12 ans : Un Mariage.

Jamais je n’aurais pensé que c’était si ennuyeux. Je suis bien contente d’être de retour dans notre chambre parce que cette fête pour Dimi, enfin son mariage, c’est la pire des choses que j’aie eu à vivre jusqu’ici… Ah non quand même, l’autre fois quand avec Lilian on s’est fait attrapés par le marchand du bout de la rue Pernette, c’était pire. On s’est salement fait disputés, j’ai été enfermée pendant un mois, punie de sortie. Et impossible d’ouvrir trop longtemps la fenêtre de la chambre, avec Sonatine qui craint toujours les courants d’air. Ne parlons même pas d’en sauter pour se promener dans le parc, cette fois il y avait toujours quelqu’un pour me surveiller…

Cette grande fête c’était ma première sortie, une sorte de mise à l’épreuve. Mère m’a regardée parfois avec des yeux sévères, comme elle fait quand elle croit que je fais une bêtise et qu’un regard suffirait à m’en dissuader. Là, ça a marché, il fallait bien.

Mes malheurs ont commencé pour descendre le grand escalier de la maison. La robe que Sonatine m’avait faite était vraiment « super-chouette » comme dirait Lilian, je me sentais bien dedans, pour une fois, alors que d’habitude les grands robes j’ai un peu du mal, c’est pas pratique. Et justement là, Sonatine avait trop bien travaillé. J’ai oublié et j’ai descendu sur la rampe depuis l’étage. A l’arrivée le pommeau de fin de balustrade s’est pris dans ma robe, avec la vitesse que j’avais prise le tissu a craqué quand je me suis réceptionnée sur le sol.

Personne n’avait rien vu donc je ne me suis pas trop étendue sur les explications des comment et des pourquoi, et puis comme on n’avait plus le temps, Sonatine a rafistolé ma robe en vitesse (Bon ça a quand même pris une bonne dizaine de minutes). Père a froncé les sourcils et m’a demandé de rester avec Sonatine. Ce que je me suis employée à faire sans broncher.

Ensuite quand les invités étaient arrivés, mais avant le début de la cérémonie, j’ai perdu Sonatine de vue. J’étais seulement allée prendre en douce un de ces petits canapés qui avaient l’air délicieux. Le temps de me rendre compte que c’était très mauvais en réalité, de le mettre dans mon mouchoir pour le jeter plus tard, et de revenir.. Hop ! Plus de Sonatine ! Avec tous ces adultes et les femmes en-chapeautées je ne pouvais pas la retrouver. Je me suis faufilée dans un coin de la pièce et j’ai pris une chaise pour grimper dessus. Si j’avais eu une échelle je l’aurais prise mais il n’y en avait pas. Bref voilà que la robe se déchire pile sur la couture que Sonatine avait réparée.

Crac.

Et paf j’ai croisé le regard de Silwenne tandis que j’essayais de tirer sur les fils pour cacher l’accident. Elle était juste en face de moi, aux cotés de Père qui discutait avec un monsieur qui regardait Silwenne d’une façon étrange. Au final Sonatine a réparé ma robe, encore. Mère, Sil et elle semblaient dire que j’avais fait exprès mais elles n’ont pas voulu entendre mes explications. Là c’était vraiment très injuste. J’ai avalé mes larmes comme j’ai pu, et puis Mère m’a demandé de rester près de Sonatine. Ce que j’ai fait, je l’ai prise par la main avec la ferme intention de ne plus la lâcher dès qu’elle eut fini de réparer ma robe.

Ensuite il y a eu un mouvement de foule, je n’ai rien compris à ce qu’il se passait. Je voulais rester en arrière pour que les convives ne déchirent pas ma robe de nouveau, mais Sonatine me tenait la main. Je ne savais pas ce que nous devions faire puisque j’étais toujours consignée dans ma chambre le jour de la répétition. Bref je me suis pressée pour passer à la suite de ma sœur et j’ai entendu quelque chose se déchirer. Je priais secrètement pour que ça ne soit pas ma robe encore, et je me suis tenue raide et les bras serrés le long de mon corps pendant toute la cérémonie, j’avis trop peur qu’un morceau tombe ou je ne sais quoi. Je n’ai jamais trouvé le temps aussi long de toute ma vie.

Pour finir j’ai pu enfin m’isoler de nouveau avec Sonatine et elle a réparé ce qu’elle pouvait, elle avait les yeux tout embués. Je me suis confondue en excuses, lui jurant que je n’y étais pour rien. Mais elle ne m’a pas écoutée, je crois en fait qu’elle pleurait pour une autre raison que je n’ai pas compris sur le moment.

Ce soir,  alors que la fête est finie pour nous, j’ai compris que Dimi n’allait plus habiter avec nous. Je n’y avais pas pensé alors que je le savais pourtant. Du coup je me suis mise à pleurer aussi.

Ça n’était vraiment pas une belle fête.

13 ans : Départ des parents.

Nous avons tous été convoqués. Le ton de mère était à la fois grave et triste. C’est une mauvaise nouvelle, c’est sûr. Ces derniers temps je les trouve toutes mauvaises. D’ailleurs Diminuendo est là aussi, preuve de l’importance de l’annonce.

Elle vient souvent à la maison, Dimi, quand Genséric a le dos tourné sans doute. Le soir elle veut nous lire des histoires, à Ary et moi. Elle croit que nous sommes encore des enfants. Elle nous prend pour les siens peut être. Elle ferait bien de s’en faire à elle et de nous lâcher la grappe. Enfin, je n’essaie pas de m’y soustraire, ça ferait encore des histoires. Tout ce qui me concerne fait toujours des histoires. La moindre petite blague vire au drame et j’ai droit à une leçon, quand ça n’est pas carrément un sermon des parents. Evidement, Sonatine en rajoute toujours une couche. J’ai de plus en plus de mal à le supporter.

Les traditions et tout le tintouin… franchement, ça m’étouffe. Je fais le pitre parce que je voudrais croire que tout ça n’est pas si sérieux. Mais en réalité, c’est d’un ennui mortel. Il est même possible que ce soit ça qui tue Sonatine lentement. Moi, je me saisi de la moindre occasion pour disparaître, je file à la canthienne. Je suis toujours mieux dehors que dedans, quelque soit le temps. Elle, elle doit rester, faire doucement et prendre soin d’elle… Elle se fait bouffer le cerveau par le protocole.

La nuit, elle arrête parfois de respirer, pendant longtemps. Ca me réveille en sursaut, j’ai pris l’habitude d’écouter son souffle constamment. Je guette. Je manque d’air quand ça arrive. C’est même arrivé que je saute du lit pour la secouer, après avoir bien trop attendu à mon goût. Ca ne rate pas ensuite, elle reprend son souffle l’air de rien, avant que je l’attrape pour la réveiller. Je me sauve la journée, il y a d’autres gens pour prendre soin d’elle alors, comme ça je peux respirer à fond. J’en profite pour faire tout ce qu’elle ne fera jamais, et plutôt deux fois qu’une.

Bref, nous voilà très sagement alignés comme toujours, du plus petit au plus grand, les yeux rivés sur nos parents qui nous font face. Un type est là avec eux, un vieux comme Dimi, nous dit Père. Je ne saisi pas tout de suite de quoi il parle, mais je vois le regard de Mère. Celui là je ne risque pas de l’oublier. Je voudrais qu’elle ne l’ait jamais eu.

Et puis les mots s’enchainent, les idées font leur chemin dans ma petite tête. Je me sens trahie, abandonnée, ou sur le point de l’être. Dimi, Sil et moi nous mettons à crier, presque en même temps. Je ne sais pas ce que les autres racontent mais moi je ne veux pas qu’ils s’en aillent. On ne peut pas séparer la famille comme ça. Les parents ne lâchent rien, ils nous mettent l’autre dans les pattes pensant que ça peut faire l’affaire peut être… Quand le silence se fait tout à coup, Diminuendo a parlé, elle était vraiment furieuse. J’ai guetté Sonatine qui était pâle comme un linge, et puis Dimi est partie en claquant la porte. Sil l’a suivie, et puis les parents ensuite, suivis de… l’Autre.

Avant leur départ, par trois fois je suis allée les trouver, je les ai suppliés de ne pas partir, à genou sur le sol, les mains jointes. Je les ai supplié de nous emmener avec eux, de m’emmener avec eux. Et puis je leur ai dit qu’ils pouvaient attendre un an ou deux, et que j’irais à leur place. J’ai eu beau pleurer, je n’ai même pas eu droit à une vraie explication.

Il n’y avait rien à redire, sans doute. Ou rien à me dire, à moi.

Sûrement.

15 ans : Un complot dans la pénombre

Cela faisait presque deux ans qu’Aristide passe la plus grande partie de son temps dans la cave, un endroit dont il ne sortait que rarement et où il détestait être dérangé. On y trouvait de vieux meubles récupérés et transformés, un fatras d’horloges et des boîtes à musique en mauvais état et un peu de tout ce qu’il avait pu trouver d’intéressant en se promenant en ville, les rares fois où il sortait.

Il y a deux jours de cela, Diminuendo et Lyam avaient décidé de descendre dans la cave pour confisquer tout ce qui pouvait ressembler à un explosif suite à au troisième essai d’Aristide d’attenter à la vie de Lyam. Ceux qui se trouvaient à ce moment dans la maison se rappellent parfaitement des hurlements de rage d’Aristide, et ni Diminuendo, ni Lyam, n’en étaient ressortis tout à fait indemnes. Depuis, plus personne n’avait vu Aristide et la cvae était demeurée silencieuse.

Cyrile avait guetté en vain la sortie de son frère et l’avait cherché dans tous les recoins de la maison où il aurait pu se retirer. Finalement, elle s’était décidée à descendre dans la cave, portant un plateau avec un repas et un livre.

L’endroit était peu éclairé, sinon pas. Mais dès que ses yeux se furent habitués à la pénombre, elle put se rendre compte que compte que quelqu’un essayait de cacher sans succès une source ténue de lumière. Cyrile, sachant pertinament quels dangers pouvaient l’attendre dans les escaliers, descendit avec toutes les précautions dont elle était capable. Hélas, à la moitié de la descente, elle sentit son mollet toucher un fil tendu en travers de l’escalier.

Cyrile, prudente, s’attendant à un piège, s’arrêta net. Passées quelques secondes de stress intense, parfaitement immobile, elle se racle la gorge et appella son petit frère d’une voix un peu tendue et manquant pour une fois d’assurance.

– Ary ? J’ai mis le pied où il ne fallait pas …

Aucun bruit, mais la lumière faiblit et l’escalier fut plongé dans le noir complet.

La jeune fille se mit à grogner.

– Je t’ai apporté de quoi manger un peu … et j’ai peut-être une idée … mais viens me sortir de là

Un long silence lui répondit, puis des bruits furtifs qui s’approchaient avant qu’une faible lumière vienne éclairer le bas des escaliers. Elle empêchait de voir qui portait la lampe, mais quelqu’un était là, assurément, à l’observer. Finalement, en montrant le plateau du menton elle insista :

– J’ai pris un livre que j’ai commencé à lire. Je ne comprends pas tout, mais il est dit qu’il y a des plantes qui peuvent rendre très malade, et même faire mourir.

Pour toute réponse, la lanterne se balança légèrement, éclairant étrangement la montée de marche, sans rejaillir sur les côtés. Un souffle un peu plus profond se fit entendre, une fois, deux fois. Enfin son frère prit la parole :

– Et tu m’as apporté des échantillons que je puisse y goûter ? D’habitude, tu ne m’avertis pas pour ce genre de choses.
– Ha ! Mais non, je t’ai apporté à manger et le livre seulement. Répondit-elle d’une voix encore altérée par l’inquiétude.
– Laisses-moi deviner … laxatif ? fit-il d’un air sarcastique.
– Ça n’a jamais tué personne, bougonna-t-elle.
– Non, mais c’est le genre de farces que tu aimes bien me faire, fit-il d’un ton acide.
– Je n’ai plus envie de rigoler. Répondit-elle simplement en haussant les épaules.

La lumière se balançat doucement, de droite à gauche, n’éclairant jamais que le pied des escaliers, avant de remonter jusqu’à Cyrile jusqu’à l’éclairer.

– Ah ?

Clignant des yeux, Cyrile répondit d’un air grave :

– Non. Ça n’est pas toi que je veux voir partir.

La lumière fit un drôle de mouvement de haut en bas avant de venir éclairer les marches devant Cyrile. Aristide renifla puis se mit à lui expliquer :

– Le fil ne fait rien, mais j’éviterais de marcher sur les deux marches qui suivent.

Sa sœur le remercia tout en regardant où elle mettait les pieds, et descendit les dernières marches précautionneusement.

La lumière suivit ses pas jusque sur la dernière marche avant de se tourner et d’éclairer un chemin encombré à travers la cave. Quelques détours ici et là, un rapide arrêt où Aristide sembla faire quelque chose sur un tas de meubles, avant d’arriver devant un vieux tapis suspendu qui faisait office de rideau qui cachait un recoin de cave d’environ trois mètres sur trois.

– C’est plus grand que je ne pensais ici. Fit Cyrile en passant un regard curieux alentours.

L’endroit était empli de vieux meubles, d’étagères, d’outils et d’objets de toutes sortes, un grand tas de choses non triées dans un coin, un soupirail crasseux d’où arrivait une faible lumière. Aristide règla sa lampe et les volets de celle-ci se tournèrent dans un léger grincement pour faire de la lumière tout autour d’eux, dévoilant un vieux fauteuil sur trois pieds et un tabouret. Aristide choisi le tabouret.

– Très astucieux, sourit-elle guère plus rassurée que précédemment.

– Moins il y’a de charbon, plus il y a de place. Assieds-toi. Répondit son frère en pointant le fauteuil du doigt.
Cyrile se laissa choir sur le fauteuil et prit un air taquin

– Et quand il n’y en aura plus on pourra brûler les meubles …

Aristide, très pâle, les yeux rougis et profondément cernés, les cheveux défaits et sales, lança un regard noir à sa sœur. Elle se racla la gorge, comme pour faire oublier sa mauvaise blague, et fit un geste en direction du plateau qu’elle avait déposé devant eux.

– J’ai pris des trucs que tu aimes, enfin je crois.

Aristide regarda Cyrile, sembla hésiter à dire quelque chose. Il se ravisa, ouvrit la bouche puis  la referma, et après avoir longuement pesé le pour et le contre.

– Merci, finit il par lâcher simplement.
– De rien. Je … enfin je m’inquiétais un peu, murmura-t-elle. Mais pas trop ! Ajouta-t-elle précipitament comme pour démentir ces propos.

Aristide considéra le plateau sans bouger un moment.

– C’est quoi le livre ? Demanda-t-il enfin.
– Ah oui … le livre. C’est un bouquin sur les plantes toxiques. Répondit Cyrile.
–  Des plantes …
– Oui, c’est moins ton rayon je suppose, mais ce qui est intéressant, c’est de réfléchir à heu …
–  C’est difficile à trouver, c’est difficile à doser, c’est fragile, mais ça peut-être très discret. La coupa-t-il d’un air professoral.
–  Ah.  Cyrile sembla réfléchir un instant.

– Il y a des plantes qu’on peut trouver comme ça et qui sont particulièrement méchantes, poursuivit-telle, même dans cette cave si ça se trouve … comme la salpêtre … enfin c’est plus un champignon.

Aristide sourit faiblement :

– Il n’y a plus de salpêtre ni de charbon dans la cave.
–  Oui, forcément. Fit Cyrile en souriant d’un air de connivence. Mon problème n’est pas tellement de trouver la plante, je sais que je peux le faire. C’est plutôt de la faire entrer dans le bonhomme. Poursuivit-elle encore.

Aristide prit distraitement quelque chose sur le plateau et le mordilla du bout des dents plus qu’il ne le mangea.

– Quel bonhomme ? Questionna-t’il.
– Telos.

Aristide s’arrêta de manger et regarda sa sœur avec attention.  Cette dernière haussa les épaules.

– Pourquoi ? se contenta de questionner Aristide.
–  Parce que.

Aristide haussa les épaules à son tour comme Cyrile n’avait pas l’air de vouloir plus s’expliquer.

– Je veux le tuer parce qu’il a fait partir Mère … et Père … et parce qu’il a pris leur place. Mais toi ? la questionna-t-il.
– Il est là pour les remplacer. S’il crève, ils seront obligés de revenir. fit-elle sur un ton de sentence.

Aristide recommença à grignoter du bout des dents.

– Et quand bien même … je veux qu’il s’en aille. poursuivit-elle.
– Il parait que le poison, le mieux, c’est quand on l’utilise sur la durée, par petites doses qui s’ajoutent.
– C’est plus discret. Mais ça va prendre un temps fou. Renchérit Cyrile.
– Il parait aussi qu’il y a des pierres qui sont de meilleurs poisons que les plantes … ou des métaux, je suis pas sûr d’avoir bien compris. Mais les plantes ? Tu penses pouvoir en trouver en ville ? Demanda Aristitde.
– Je me renseigne encore, seulement. Fit-elle.

Aristide observa longuement sa sœur, hésitant

– C’est ton truc, les plantes, non ? la questionna-t-il finalement.
– Les premiers chapitres parlent surtout des problèmes d’intoxication et … il y a des poisons qui doivent entrer dans le sang. Il faut un truc pour piquer. Répondit-elle.
– Tu savais que parfois, on a utilisé de la poudre de diamant comme poison ? La personne avale ça et les petits morceaux de diamants coupent les intestins.
– Bah ! Le diamant … bougonna Cyrile, pour en faire de la poudre, c’est coton.
– Sinon, le truc classique, renchérit Aristide, c’est une planche, tu y plantes un clou, tu l’enduis du poison et tu le poses là où tu penses que la personne passe.
– Et si c’est un autre qui passe ? S’inquiéta-t-elle
– C’est un peu le problème que je rencontre là. J’aime bien les bombes, mais comment être sûr que c’est bien lui qui la déclenchera ?fit-il en soupirant. T’as peut-être raison, continua-t-il, mais je sais faire des bombes et des pièges, pas des poisons. Mais … tu me donnes une idée …
– Vraiment ? Cyrile se mit à sourire.

Le visage d’Aristide commença doucement à s’éclairer tandis qu’il eut une pensée qui lui donna un mince sourire.

– Oui … une très bonne idée même. Après tout, tant qu’ils pensent que je fais des explosifs, ils vont pas chercher ce que je peux faire d’autre …
– Oui, ni moi pour toi.

Aristide regarda à nouveau sa sœur.

– Donc tu veux aussi qu’il parte ? voulu-t-il s’assurer.

Cyrile opina doucement sans rien répondre de plus.

– Et si je te dis quelque chose de secret, tu jures de le garder pour toi … en tous cas si ça concerne Telos ? Promis, juré, craché ? Demanda Aristide.

Cyrile se redressa :

– Promis, juré, craché.

Aristide se pencha un rien en avant et baissa la voix.

– Alors, si tu veux bien, je vais prendre ton livre et demain, je commencerais à t’apporter d’autres livres. Des carnets avec des explications sur comment faire des pièges, les empoisonner, les placer, comment ils ont fonctionné. Moi je vais lire tes livres et toi les miens. Fit-il sur le ton de la confidence. Et puis, je vais un peu m’intéresser à l’alchi … à la cuisine. Continua-t-il.
– D’accord. Répondit elle simplement.

Aristide eut un mince sourire aux lèvres :

– Par contre, je sais pas comment faire pour reconnaître les plantes, j’y connais rien.
– Oh ca je peux le faire. répondit-elle.
– D’accord. Mais tu oublies pas, tu as promis, juré, craché. Personne doit savoir, même pas Dim. Ajouta-t-il en la fixant droit dans les yeux.
– Je ne dis rien. Promit Cyrile. Juré ! Je vais lire aussi dans ce sens, je n’y avais pas pensé, c’est une super idée … enfin, j’espère.

– Et après, quand il sera parti et nos parents revenus, tu pourras recommencer à m’embêter. Plaisanta-t-il à moitié, en reprenant soudainement un visage un peu plus fermé

– Bof ! fit elle peu convainque.
– Moi ça me va. Dit-il pour la rassurer.
– Moi je veux que les parents reviennent. Répondit Cyrile avec une petite moue.
– Tant qu’il part et que Mère … et Père … reviennent … le reste me va.
– Pareil.

Cyrile hocha la tête. Aristide observa sa sœur un court instant avant de lui tendre la main.

– Alors on a un pacte.

Cyrile tendit sa main et prit celle d’Aristide.

– On a un pacte. Répondit elle d’un ton grave.

Aristide se tourna vers le plateau et contempla la nourriture qu’il n’avait pratiquement pas touchée.

– Je crois qu’il serait temps que je remonte et que je prenne un bain.

– Oui. Ça serait pas un mal. Répondit sa soeur en fronçant le nez avec humour.
– M’intéresser à la cuisine … Pensa-t-il à voix haute. Ça va être dur de trouver des choses en verres pas trop cassées. Par contre j’ai déjà un vieux fourneau, avec une ou deux modifications …

Aristide se plongea dans sa réflexion tandis que sa soeur attendait la fin de la phrase.

– Là je suis vite larguée, mais ça mérite qu’on y prête attention. Sinon y’a un truc qu’on peut faire aussi … et qui serait très rapide. reprit-elle finalemnet.

– Euh … oui ? questionna-t-il de son air distrait coutumier.
– On pourrait demander à mes copains de le battre ? proposa Cyrile.
– Il est grand, fort, rapide et entraîné. C’est pas comme ça qu’on dit ?
–  Si … pfff … ça servirait à rien alors. Soupira-t-elle.
– Alors on va dire un autre truc : si on fait un truc de notre côté, on dit juste à l’autre où et quand. Comme ça, on risque pas trop de … heu … mélanger nos trucs. Expliqua Aristide.
– Bonne idée, oui, fit-elle. Mais surtout je pense qu’il faut viser juste et pas poser des trucs sur lesquels n’importe qui pourrait tomber.
– Oui … je comprends. répondit-il en hochant la tête.
– Je ne voudrais pas qu’il t’arrive un truc, ou à Sonatine …
– Ben, si j’ai bien compris comment il faut faire, ça veut dire qu’il faut l’observer, noter ses habitudes, savoir s’il fait des choses particulières à tel ou tel moment… Dit Aristide d’un air pensif.
– Oui. Ça peut prendre du temps aussi.
– Ouais, grimaça Aristide. Au moins quelques jours. Mais si on est deux, ça devrait aller deux fois plus vite.

Aristide vida une tasse de la visserie qui s’y trouvait et se servit une gorgée de la carafe apportée par sa soeur.

– Oui … et moins évident à voir, enfin je crois. Poursuivit Cyrile.
– Le mieux, ce serait quand même qu’il croit que c’est juste moi.  ajouta-til en posant sa tasse. Comme ça, même s’il me confisque tout …
– Le mieux serait qu’il croit que c’est fit sa soeur d’un air entendu.

Le visage d’Aristide se figea un instant.

– Quoi donc ? fit sa soeur en le regardant, perplexe.
– Jusqu’à la prochaine fois. Seulement jusqu’à la prochaine fois. Dit Aristide.
– Oui, forcément. Fit Cyrile en haussant les épaules.
– Alors ça me va. On va faire comme ça alors. Ajouta-t-il ensuite après un instant.
– Oui. Fit Cyrile simplement.

Aristide resta songeur ensuite pendant un moment, sa soeur resta immobile et silencieuse tandis qu’il se tournait vers l’établi, le fouillant du regard.

– Fais attention à cinquième et à la sixième marche en montant. Dit-il enfin en quittant son tabouret sans plus s’occuper d’elle.
– Oui, j’avais compté. Répondit Cyrile en souriant.

Cyrile se leva et prit la direction de la sortie.

– Mais j’enlèverais pas ce piège-là. C’est ma cave ! s’exclama Aristide avant qu’elle ne soit sortie.
– Oui oui. Répondit-elle. De toute façon, personne vient ici que toi.
–  Ils ont intérêt ! Rit-il en se retournant pour la voir.
– Clair.

Cyrile fit quelque pas et Aristide contempla son établi de novueau, avant de s’avancer pour commencer à réunir certaines pièces.

– À plus tard alors … Fit-il, tout à sa réflexion. Quand Sonatine aura fini d’occuper la baignoire.

– Oui … Je te laisse le livre. Heu … hum … il ne m’appartient pas, c’est un emprunt. Fit Cyrile en posant le livre hors du plateau.
– Un livre, c’est précieux, comme une montre. Je ferais attention et je le lirais très vite. Dit Aristide.
– Merci. Je trouve aussi. Sourit-elle.
– Je serais là au souper en tous cas. Fit son frère en lui jetant un regard.
– Je crois qu’ils seront contents. Répondit Cyrile.

Aristide haussa ses épaules.

– Moi je le serai en tout cas, insista-t-elle.

Aristide s’arrêta un instant avant de reprendre son travail, un rien plus lentement, alors que Cyrile sortait en évitant soigneusement les marches piègées.

22 ans : Un anniversaire en demi-teintes

Dans le grand salon, un peu vide depuis que la plupart des meubles ont été vendus, les sœurs de la fratrie s’activent tandis que dans un coin de la pièce Lyam Telos observe en silence les préparatifs.

Sonatine : Diminuendo, c’est bien vous qui deviez surveiller la cuisson du gâteau ?
Diminuendo : Bien sûr … Et il a fini de cuire depuis un petit moment, je le laisse refroidir.

Diminuendo soupire, l’air gênée.

Sonatine : Ouf !

Sonatine semble rassurée, aussi stressée que si c’était sa vie qui était en jeu.

Cyrile : Heu … j’ai apporté de la gnôle.

Cyrile sort une bouteille d’une besace laissée là plus tôt tandis que Silwenne s’occupe de mettre la table et décorer la pièce.

Sonatine : Il va falloir se faire encore plus belles que d’habitude pour lui, le moment doit être vraiment magnifique, hein.

Cyrile préfère ne pas relever.

Diminuendo : Inutile de trop formaliser l’occasion, très chère sœur … Quoique …
Sonatine : Chaque moment de vie, aussi intense soit-il, se doit de ne jamais être bâclé.
Cyrile : On aurait pu le faire avant-hier, ça aurait été plus surprenant … et inoubliable, du coup.
Sonatine (taquine) : Il ne faut pas non plus faire n’importe quoi Cyrile, avec toi aux commandes, on irait droit dans le mur.

Cyrile secoue la tête et pose sa gnôle 95° sur la table avant de s’occuper à remettre droites les fourchettes déjà pourtant impeccablement placées.

Cyrile (sourire en coin) : Oui, mais alors quelle exaltation juste avant la collision …

Silwenne chantonne doucement en préparant les chandeliers, puis se redresse pour admirer l’ensemble d’un air pensif et critique.

Diminuendo (regarde autour d’elle) : Bien …
Sonatine : Cyrile, j’apprécierai que tu mettes un peu de maquillage pour l’occasion.
Cyrile : Nan.

Diminuendo sourit.

Sonatine : Un effort serait le bienvenu.

Cyrile abandonne les fourchettes et va se poser contre un mur l’air maussade.

Diminuendo : Sonatine, pour cette occasion, l’idéal ne serait-il pas que chacune d’entre nous soit telle qu’elle veut être ?
Sonatine (souriante) : Oui, dans le respect des traditions et des exigences liées à notre sexe.
Silwenne : Puisque nous sommes entre nous … Je pense que Cyrile peut bien rester naturelle …
Cyrile (à Silwenne et Diminuendo) : Merci.

Cyrile est gravement soulagée.

Diminuendo : Si c’est de traditions qu’il est question … Cyrile, veux-tu bien nous servir à tous un verre de ta liqueur ?
Cyrile (d’un ton enjoué) : Ouep.

Lyam reste à l’écart, silencieux, dans sa seconde armure, celle qu’il ne sort que pour les « grandes occasions », impeccablement propre et entretenue.
Cyrile se saisit de la bouteille et sert généreusement six verres.

Sonatine : Cyrile, il serait bien d’attendre notre petit prince avant de servir à boire.
Cyrile : C’est pas tout à fait une liqueur … Ahum.
Diminuendo : Je vais chercher le gâteau … Lyam, seriez-vous assez bon pour appeler Aristide ? Et faites attention en descendant, je crois qu’il teste certains mécanismes.

Lyam Telos s’éloigne et va chercher – précautionneusement – le terroriste en herbe.

Cyrile (bas à Sonatine) : Tu as fait un cadeau toi ?
Sonatine (répond sur le même ton) : Bien entendu !

Cyrile : Ah.

Silwenne se place devant un miroir et s’assure que son maquillage et sa coiffure soient toujours parfaits tandis que Cyrile soupire et met les mains dans ses poches. Sonatine lui fait un signe et elle ressort les mains de ses poches en grognant.

Diminuendo : Vous verrez, il aura probablement oublié que son anniversaire est aujourd’hui …

Silwenne arrange sa robe et son décolleté, même si cela n’était nullement nécessaire, avant de revenir auprès des autres tandis que Cyrile attend sagement le retour de Lyam.

Devant l’entrée de la cave fermée, sur laquelle se trouve attachée à un vieux morceau de corde une sonnette qui n’était pas là hier, Lyam frappe la porte du poing. Il  observe la sonnette pour trouver un éventuel début de mécanisme et trouve, en la retournant, un petit papier sur lequel il est écrit « pas aujourd’hui ».
Il continue à observer la porte en cherchant quelque chose qui sort de l’ordinaire, puis frappe de nouveau du poing à la porte, un peu plus fort. Quelques instants se passent et on entend une clé tourner dans une vieille serrure rouillée … on s’y reprend à deux fois.
La porte s’ouvre et un Aristide pâle apparaît en tenue ma foi fort décente.

Lyam : Vous êtes attendu.
Aristide : Ah … Telos … Dommage … Et merci.

Lyam tourne les talons et retourne auprès des membres de la Fratrie qui ne cherchent pas à le tuer sous le regard d’Aristide qui l’observe un instant avant de lui emboîter le pas.

Silwenne : Jusque-là tout va bien … Pas de cri … Pas d’explosion …
Diminuendo : C’est justement ce qui m’inquiète.

Sonatine est souriante, plus qu’à son habitude.
Lyam revient calmement dans la pièce et se décalant, laissant apparaître derrière lui, enfin, l’enfant prodigue et se met un peu à l’écart. Cyrile sourit.

Aristide est pâle, vêtu fort correctement de sombre. Seules quelques éraflures sur le visage, souvenirs d’une expérience récente, troublent l’allure d’un jeune homme qui semble s’être préparé pour ce moment. Il est fort élégant dans sa tenue étonnement propre et brossée, encore qu’usée. Il arbore un visage inexpressif, un mince sourire aux lèvres, aussi forcé qu’à son habitude quand il a affaire à des conventions sociales qui le dépassent quelque peu. Il hésite quelque peu sur qui doit faire quoi à cette étape.

Diminuendo : Parfait !

Diminuendo se retire dans la cuisine tandis que Sonatine approche du petit prince et l’enlace délicatement et sans doute un peu précipitamment.

Sonatine : Vous êtes très élégant, cela vous va à ravir.
Cyrile (salue maladroitement de loin): Salut Ary.

Aristide hésite un instant, puis se recule de deux pas et s’incline devant sa sœur Sonatine avec une once d’hésitation.

Aristide : Je le dois à vous et à vos leçons permanentes, chère sœur. Cissy … Bonsoir.

Silwenne se contente de sourire, silencieuse.

Sonatine : Cessez les flatteries, c’est votre anniversaire et nous devons en ce jour le célébrer dignement.

Aristide sourit un rien plus naturellement en s’adressant à sa sœur Cyrile.

Aristide : Oui … mon anniversaire. Celui de la majorité selon les anciennes coutumes.

Diminuendo revient, portant le plateau sur lequel est posé le gâteau orné de 18 bougies.

Diminuendo : J’ai fait ce que j’ai pu avec ce que nous avions … Bon anniversaire, Aristide.

Sonatine joint ses mains contre sa poitrine, toute émerveillée du moment.

Cyrile : Joyeux anniversaire !
Silwenne (doucement) : Bon anniversaire, petit frère …

Diminuendo a l’air grave, les lèvres serrées.

Sonatine : Je vous souhaite un très joyeux anniversaire mon cher frère adoré.

Aristide observe longuement le gâteau, comme s’il cherchait quelque chose. Il jette un bref coup d’œil à Lyam, puis à Cyrile, avant de contempler à nouveau le gâteau.

Cyrile : C’est Dimi qui l’a cuisiné.
Diminuendo : Hmmm … Je propose, afin d’éviter tout accident impliquant des phénomènes de combustion, que vous souffliez vos bougies avant que nous ne trinquions … Cyrile nous a je crois ramené un assez proche équivalent de notre Brénevi.
Cyrile : Exact.

Aristide reste un instant songeur en apprenant que c’est Diminuendo qui a fait le gâteau et se rappelle les premiers essais de celle-ci dans ce domaine. Il est vrai que depuis, elle a fait de grands progrès.

Silwenne (toujours souriante) : Eh bien qu’attends-tu ? Souffle, voyons.
Aristide : Oui … C’est plus prudent …
Cyrile : Je t’en ai gardé une bouteille rien que pour toi, d’ailleurs, Ary.

Aristide continue de contempler le gâteau, puis fait un tour des personnes présentes, s’attardant un court instant sur chacune d’elle.

Aristide : Un moment particulier.

Cyrile lui sourit gentiment tandis que Sonatine acquiesce de la tête.
Diminuendo penche sa tête sur le côté en rajustant une mèche de ses cheveux.

Aristide : Mais qui ne le sera pas tout à fait.

Aristide soupire doucement, puis inspire profondément. Il cherche le point qui lui parait le plus favorable et souffle puissamment, encore qu’il manque un rien d’exercice, sur les bougies. Sonatine plisse les yeux et Diminuendo a un sourire discret.

Aristide souffle longuement les bougies jusqu’à ce qu’il parvienne enfin à éteindre la dernière bougie, un rien à bout de souffle. Sonatine applaudit.

Cyrile (applaudit) : Bravo !

Silwenne applaudit discrètement.

Diminuendo : Trinquons maintenant !

Aristide sourit un rien timidement, un rien plus chaleureusement qu’à l’accoutumée.

Aristide : Oui … trinquons …

Cyrile tend un verre bien plein à chacun.

Sonatine : Le moins plein pour moi Cyrile s’il te plaît.

Lyam Telos récupère son verre, silencieux, de marbre. Discret mais répondant toujours présent à l’appel.

Cyrile (clin d’œil à Sonatine) : Bien sûr.
Diminuendo (verse une larme de son verre au sol) : À nos glorieux ancêtres !
Cyrile (fait semblant d’en renverser à son tour, gaiement) : À nos glorieux ancêtres !

Silwenne saisit le sien avec moults précautions pour ne pas brûler l’étoffe et décolorer ses gants.

Aristide (verse à son tour une larme au sol) : Glorieux et moins glorieux. Ils ont tous espéré faire de leur mieux.
Diminuendo (fronce légèrement les sourcils puis lève son verre) : Et aux vivants dont nous avons la chance d’être entourés.

Silwenne regarde le pauvre tapis puis, avec un haussement d’épaules, les imite, alors que Sonatine évite de se plier à cette coutume barbare et porte délicatement le verre à ses lèvres. Lyam lève légèrement son verre, à la gloire des ancêtres.

Cyrile lève son verre aux vivants et boit cul sec avant de cligner des yeux pour en chasser des larmes. Silwenne se sent un rien visée mais ne relève pas et goûte la gnôle.
Diminuendo boit son verre cul sec tandis que Lyam se contente d’une gorgée.

Aristide : Aux morts qui se reposent et aux vivants qui les rejoindront.

Aristide boit son verre cul sec, sent les larmes lui venir aux yeux pendant que l’alcool lui ronge les entrailles. Diminuendo essuie une larme, peut-être moins due à l’émotion qu’à l’alcool. Sonatine esquisse une petite grimace et pose le verre dont elle n’a vidé qu’un petit cinquième.

Aristide attend que son visage soit redevenu pâle et tend le verre à Cyrile pour qu’elle le remplisse à nouveau, annonçant de fait une seconde tournée pour tout le monde.

Silwenne : C’est … * hésite entre immonde, intéressant et se taire pour calmer sa gorge *

Cyrile sourit et ressert son frère, puis elle-même et ensuite qui lui tend son verre.

Sonatine : Cyrile fais attention, c’est très fort hein.

Lyam Telos refuse poliment la seconde tournée tandis Diminuendo tend son verre, évidemment, à une Cyrile ravie.

Cyrile (les joues un peu roses) : Ça cogne quand même.

Aristide semble attendre que tout le monde ait à nouveau son verre plein.

Silwenne : Et si nous goutions ce gâteau ?

Sonatine refuse poliment en mettant ma main sur mon verre.

Diminuendo : Les traditions, Sonatine … Les traditions …
Silwenne (regarde son frère en souriant) : Ah … Mais avant … Un discours me semble de rigueur.
Sonatine : Ben c’est déjà bien que j’en boive un.

Aristide sourit un rien plus doucement à Sonatine.

Aristide : On en peut faire de discours qu’avec un verre plein. Traditions !
Diminuendo : Et puis je ne peux pas poser un verre plein pour découper le gâteau, vous savez comme moi que ça porte malheur.
Sonatine (souffle un moment) : Je doute que ce soit très bon pour mon mal.
Aristide : La tradition exige seulement que le verre soit plein.
Cyrile : Pas qu’on le boive.

Cyrile regarde Sonatine.

Sonatine : Une âme dévouée finira mon verre alors … mais pas Cyrile.
Cyrile : Pourquoi donc ?
Silwenne : Traditions et superstitions vont de pair … Mais cela n’évitera pas le discours.

Lyam Telos garde son verre plein, moins une gorgée à la main, observant l’étrange scène d’un œil neutre et habitué.
Sonatine ne donne pas de réponse à Cyrile comme si c’était une évidence. En réponse, cette dernière fait une petite moue et reporte son attention sur Aristide qui fait un rapide tour de l’assemblée du regard avant de contempler un instant son verre.

Aristide : Et bien … hem …

Cyrile sourit d’un air taquin.

Aristide : Tout d’abord, j’aimerais rendre … euh … hommage … à certains … à certaines …

Aristide toussote légèrement pour s’éclaircir la voix.

Aristide : J’aimerais d’abord remercier Dim pour tout ce qu’elle a fait pour nous … pour moi … durant toutes ces années … surtout ces dernières années.

Sonatine acquiesce doucement de la tête et Diminuendo penche la tête sur le côté, sourit peut-être un rien tristement.

Aristide : Elle n’a jamais rien dit, elle ne s’est jamais plainte, mais je ne doute pas que le prix qu’elle a payé pour son droit d’aînesse dépasse de beaucoup ce que nous … ce que je lui ai rendu à ce jour.
Aristide : Merci Dim …

Sonatine est émue, tout comme Diminuendo les yeux rougis, manifestement gênée, alors que Silwenne sourit tendrement à cette dernière.
Diminuendo semble sur le point de dire quelque chose, et se retient.

Aristide (se tourne vers Silwenne) : Sylve … Je ne suis pas sûr qu’on se comprenne très bien et je ne comprends pas toujours le pourquoi de ce que tu fais, mais j’ai appris des choses fort utiles au fil du temps, notamment que dans le doute, il ne faut pas hésiter à frapper fort et en dessous de la ceinture.
Quoi qu’il en soit, nous sommes ce que nous sommes et nous faisons avec cela, au mieux … toi plus que les autres.

Diminuendo hoche la tête, sourit en direction de Silwenne qui n’est pas certaine de bien saisir l’allusion, mais elle n’ajoute rien et laisse le petit prince continuer son allocution.

Aristide se tourne vers Sonatine et s’incline légèrement.

Très chère sœur … Vous qui m’avez appris le maintien et l’art des convenances … Tout comme l’art d’en user au moment opportun. Chaque forêt vierge a ses dangers et ses pièges, celle que vous appréciez n’est probablement pas la moins dangereuse.

Sonatine pince un doux sourire au coin des lèvres et esquisse une petite et gracieuse révérence envers son interlocuteur.

Le sourire d’Aristide se fait un rien plus naturel lorsqu’il se tourne vers Cyrile alors que cette dernière fronce un rien son visage en attendant la suite.

Petite grande sœur … ou l’inverse … Il y a des cachettes que je ne connaîtrais jamais et il y en a que je ne te montrerais jamais. Mais un jour, il me faudra aller voir un arbre et j’aimerais que tu m’accompagnes … ou l’inverse.

Cyrile hoche la tête en silence.

Aristide hoche de la tête en retour avant de se tourner vers Lyam et le un léger tintement métallique trahit le fait qu’il s’est redressé pour être bien droit.

Aristide : Et ce cher Lyam Telos … fidèle au poste … forcément. Je continue à penser que vous savez plus que vous ne le dites, mais je crois qu’il est temps pour moi de cesser d’essayer de vous tuer. Ces longues années en votre compagnie m’ont beaucoup appris, quoique pas forcément de la manière qui vous aurait convenu.
Mais surtout, je sais que vous avez payé de votre personne pour décharger quelque peu Dim de son fardeau. Pour cela, Maître d’Armes, je vous remercie.

Diminuendo sourit à Lyam qui reste droit, impassible, tandis Aristide contemple son verre d’un air plus sombre.

Aristide : Il nous reste les absents … Ceux qui devraient être là et qui ne le sont pas … ou ne le sont plus. Ceux qui sont partis.

Sonatine se mordille la lèvre inférieure tandis que Diminuendo se raidit légèrement.

Aristide : Je présume qu’il faudrait pardonner à certains de ce qu’ils ont faits, je présume que certains avaient de bonnes raisons … il y a toujours de bonnes raisons. Je présume qu’ayant atteint l’âge de ma majorité je devrais être plus mûr, plus mature, voir les choses autrement. Je ne suis pas sûr de pouvoir faire cela, mais je ne suis ni plus grand, ni plus fort qu’il y a une journée.
Comme eux, comme tous, je fais avec ce que je suis. Alors … pour l’instant … je laisse le bénéfice du doute.

Cyrile soupire doucement.

Aristide : Un jour viendra, peut-être, où j’en saurais assez. Mais pour ce soir, je me contenterais de faire une trêve.
Silwenne (lève son verre) : L’espoir est dans l’ancienne maison.

Une larme se faufile malgré des yeux rougis de Sonatine et Aristide lève son verre en réponse à Silwenne.

Diminuendo (lève également son verre) : Oui … l’espoir est dans l’ancienne maison.

Silwenne, Cyrile, Aristide et Dimunendo vident leurs verre cul sec, tout à tour, puis Diminuendo commence à découper le gâteau, un gâteau traditionnel tout simple, aux noisettes avec un glaçage de chocolat, et sert une tranche à chacun.
Sonatine boit un cinquième de gorgée, Lyam Telos ne touche plus au contenu de son verre et Silwenne grimace en reposant son verre vide.

Sonatine : Merci bien!

Silwenne prend l’assiette et la fourchette qu’on lui tend.

Cyrile (en mangeant avec les doigts) : Merci.
Silwenne : Merci. Voyons s’il est aussi bon qu’il est appétissant.

Aristide prend son assiette en silence alors que Sonatine le goûte déjà avec délice.

Diminuendo : Bien … je crois que Lyam et moi avons une annonce à vous faire … C’est à la fois le bon moment pour cela, et pas le mieux choisi …

Silwenne lance un regard allant tour à tour de l’un à l’autre.

Sonatine : Une annonce?

Cyrile la bouche pleine, les regarde tour à tour tandis Aristide contemple la tranche de gâteau sans perdre une miette de ce que dit Diminuendo.

Silwenne : Si ce n’est pas le mieux choisi pourquoi ne pas attendre ? Après la petite fête ?

Lyam Telos reste de marbre.

Diminuendo : Pourquoi ne pas attendre ? Parce que maintenant qu’aujourd’hui Aristide a atteint sa majorité, il y a certaines choses qu’il faut porter à sa connaissance, et à la vôtre …

Sonatine s’attend au pire et Aristide ne quitte toujours pas sa part de gâteau des yeux.

Aristide : Si Dim pense que c’est le moment, c’est que c’est le moment.
Silwenne : Quitte à gâcher la fête, donc …
Aristide : Une fête … ou le moment où d’ordinaire, si certains étaient ici plutôt qu’ailleurs, j’aurais à assumer de nouvelles responsabilités.
Diminuendo : Je préfère ça à maintenir une illusion, Silwenne … Désolée.
Silwenne (repose l’assiette sur un bord de table) : Maintenant que c’est dit, de toute façon … Autant continuer.

Cyrile finit de manger sa part en silence tandis que Sonatine a perdu de son appétit. Silwenne, son assiette intacte, regarde Diminuendo

Diminuendo (inspire profondément avant de parler) : Nous avons, tous et toutes, du faire des petits sacrifices ces dernières années … J’aurai voulu que nous n’ayons pas à le faire, mais je n’ai pas réussi à reprendre les rênes de l’affaire que m’a laissée Genséric, et je vous demande pardon de cet échec … Lyam a fait de son mieux pour m’aider à maintenir les finances à flot, mais ça ne suffit plus.
Nos caisses sont vides, voilà.

Sonatine semble étonnée.

Diminuendo : Complètement. Et je ne sais vraiment pas comment nous allons pouvoir continuer.

Sonatine semble peu à peu bouleversée à cette annonce tandis qu’Aristide continue à contempler sa tranche de gâteau comme si elle était une forme de vie étrangère.

Cyrile (s’approche de Sonatine qu’elle regardait du coin de l’œil) : On peut trouver d’autres choses à faire pour heu … pouvoir continuer. Non ?
Diminuendo : Il le faudra bien …
Silwenne (va droit au but comme à son habitude) : Que suggères-tu ?
Lyam Telos : Il faut que vous songiez à travailler vous-même.
Cyrile : Voilà. Enfin ceux dont la santé le leur permet, bien sûr.
Silwenne (le regard interrogatif, plus excité que bouleversé, allant de Diminuendo à Lyam) : Travailler ?

Cyrile sourit de toutes ses dents.

Diminuendo : Je ne sais pas vraiment dans quel domaine, qui voudra bien de nos services, mais oui, il faudra bien.
Sonatine : Je ne sais pas si je saurais travailler …
Silwenne : Et … Pour faire quoi ?
Lyam Telos : J’ai dû jouer au mercenaire pour ramener plusieurs sommes.
Sonatine : J’avoue ne m’être jamais préparée à une telle chose.
Silwenne : Je sais … Dimi va vendre des gâteaux, Cyrile son tord boyau, Sonatine à la couture … ?
Diminuendo : L’idée me répugne que les Beaumont se retrouvent au service de qui que ce soit, donc nous irons chercher par nous-même.
Cyrile : Non c’est pas pour la vente, mes bouteilles.

Cyrile rougit et Aristide sourit pour la première fois depuis un moment et relève son regard pour regarder ses sœurs.

Sonatine : Je préfèrerais être mariée à un riche héritier à choisir.

Aristide se rembrunit et regarde tour à tour Sonatine puis Diminuendo, réfrénant une légère grimace devant le manque de tact de sa sœur.

Diminuendo : Pour ça il faut te constituer une dot avec autre chose que nos vieux souvenirs, Sonatine.
Silwenne : Je ne sais rien faire de spécial … Je ne suis pas aussi habile que vous … Quant à travailler de ses mains …
Cyrile (regarde Silwenne, surprise) : Mais si tu sais faire pleins de choses. Pour commencer tu joues du violon comme personne.
Diminuendo : Cela n’arrivera pas ! Et tu sais faire des choses étonnantes, Silwenne, tout comme Sonatine … Jouer avec les sens des autres …

Aristide lève un instant les yeux au plafond, puis les reposent sur Diminuendo.

Diminuendo : Personne n’est incompétent autour de cette table, est-ce clair ?

Cyrile opine tandis que Lyam Telos croise les bras et patiente, regardant le sol.

Silwenne : Tout dépend de l’utilité des compétences à assurer un revenu décent … Et honorable.

Le visage d’Aristide est brièvement traversé par un sourire glacé avant qu’il ne commence à fouiller ses poches. Il sort un objet qu’il tient au creux de sa main, le regarde un instant d’un air songeur avant de le lancer à Diminuendo qu’elle rattrape au vol.

Aristide : Pas de faux espoirs … Les pierres sont fausses, mais l’or reste de l’or et le mécanisme que cache l’objet pourrait intéresser certains collectionneurs.

Aristide, adossé et les bras croisés, ne quitte pas Diminuendo des yeux.

Aristide : Montre, horloge ou boîte à musique. Pas plus d’une par jour. Et je refuse les montres bon marché offertes en cadeau aux vieux employés méritants.
Sonatine (entêtée) : Moi je ne sais rien faire.
Cyrile : Tu sais coudre et broder.
Sonatine : Je couds et je brode quand ma santé me le permet seulement.
Cyrile (à sa sœur) : Ce sera suffisant.
Diminuendo (sourit à nouveau et tend un petit paquet) : Ce qui me fait penser … Joyeux anniversaire Aristide

Aristide prend le cadeau, un rien gêné, ne l’ouvrant pas tout de suite. Il tourne lentement le cadeau dans ses mains, le regard allant lentement de Diminuendo à Lyam tandis que Sonatine reporte son attention sur le cadeau.

Diminuendo : J’ai pensé … J’espère que ça représentera un défi intéressant pour vos talents, Aristide.
Aristide (pose à nouveau ses yeux sur le cadeau) : Oh ?

Aristide commence à lentement déballer le paquet, très soigneusement, en prenant garde à ne rien déchirer, et découvre une montre gousset, assez large, au métal terni.

Diminuendo : Elle est supposée indiquer l’heure, les phases de la lune et des constellations, mais elle ne marche plus.
Aristide : Ah ?
Diminuendo : J’ai supposé que le mécanisme d’une telle montre devait être assez complexe …

Cyrile et Diminuendo sourient alors qu’Aristide se perd entièrement dans la contemplation de la montre qu’il examine sous tous les angles avant de l’ouvrir avec précaution.

Aristide : Un cadeau … plein de complications.
Aristide (sourit brièvement) : Merci !
Sonatine (tend un paquet relativement mou) : J’ai un cadeau aussi.

Aristide prends le nouveau paquet, un rien surpris.

Aristide : Hem … merci.

Silwenne observe tout ceci avec un fin sourire aux lèvres et une fois encore Aristide ouvre avec précaution le cadeau en s’attendant à tout, sauf à une autre montre. Il en extrait une fort jolie chemise en brocart doré.

Sonatine : J’ai fait un peu de récupération pour arriver à ce résultat.
Aristide : Merci à vous, très chère sœur. Le résultat est magnifique .. forcément.
Sonatine : J’ai tenté de faire au mieux afin que cela vous plaise.
Aristide : Et vous avez parfaitement réussi.
Sonatine : Tant mieux alors.
Aristide : Merci à vous. Je ne doute pas qu’un jour, elle me sera fort utile.

Silwenne se détourne pour aller chercher le cadeau pour son frère et se dirige vers son très précieux étui à violon. Elle l’ouvre, saisit son instrument et son archet avant de revenir.

Silwenne (petit sourire à Diminuendo) : Mon cadeau à moi … est un cadeau des sens …
Aristide : Les sens … forcément …
Silwenne (s’incline légèrement) : Je t’offre un souvenir et … je l’espère … de la joie.

Aristide s’incline à son tour et Silwenne lève l’archet et commence à jouer, bientôt accompagnée de petits papillons chimériques voletant dans la pièce.

Cyrile tire une chaise pour Sonatine pour qu’elle puisse s’y asseoir, Aristide écoute avec attention sa sœur jouer de l’archet alors Diminuendo penche la tête sur le côté, perdue dans ses pensées.

Le concerto terminé, Silwenne s’incline pour saluer à la fin du morceau, exécutant une révérence parfaite.

Aristide (applaudis lentement sa sœur tandis que les dernières notes résonnent encore dans sa tête) : Magnifique !

Cyrile applaudit.

Diminuendo : Merci, Silwenne.
Aristide : Il ne manque qu’un chapeau dans la rue.

Sonatine applaudit, ayant fort apprécié, tandis que Silwenne sourit doucement, gardant l’instrument à la main au cas où.

Diminuendo : Cela fait longtemps que nous n’avons pas joué toutes ensembles, non ? Que diriez-vous de profiter de cette occasion ?
Cyrile : Hein ?
Aristide : Un concerto … comme il y a … longtemps.

 

Fin du Background, début du jeu

(pour la suite, lire le Journal de Tanaïs)

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